Juin 2023, je suis invitée à rédiger un article pour une plateforme montante dans le monde du yoga. À l’époque, le projet me paraît aligné : donner la parole à des profs engagées, variées, sur des sujets de fond. On me propose d’écrire sur « quoi faire juste après avoir décroché ton YTT », article que je voulais pratico-pratique, déculpabilisant et utile. Je m’y consacre avec joie. C’est mon premier article, j’y passe deux semaines.
J’écris ce texte avec sincérité. Je le relis, je le peaufine. Il est publié. À la condition expresse — validée par les deux parties — que mon nom apparaisse, qu’un lien vers mon compte Instagram et vers mon podcast “Des paillettes sur ton tapis” soient intégrés. Logique : c’est une collaboration, pas un ghostwriting.
Je précise ici que c’est la personne en charge de la plateforme qui me contacte, via mon Instagram. Donc…techniquement, elle sait que l’on travaille avec la même audience : les (jeunes) profs de yoga.
Mais deux ans plus tard, en juin 2025, par curiosité, je retourne voir ce qu’est devenu mon premier article.
Et là… surprise.
Une belle vitrine, mais pas pour moi
La plateforme a bien grandi depuis. Elle s’est affirmée comme un “hub français” de formations pour profs de yoga. On y retrouve des noms reconnus, des contenus variés, des publicités ciblées. Ça sent la stratégie bien rodée. Et en soi, tant mieux. On a besoin de cela aussi dans nos métiers. De sentir l’assurance et le réseau.
Le constat : je retrouve mon article rapidement. Il apparaît en bonne place sur le page du blog. Je souris. C’est plutôt chouette.
Je me relis.
Mon nom est mentionné à la fin (ouf).
Mais :
>> mes liens ont disparu.
>> et surtout, plusieurs encarts publicitaires pour leurs propres formations ont été glissés directement dans mon texte, comme si c’était moi qui les avais écrits.
Le yoga, oui. Le business, aussi.
J’enseigne le yoga. Je forme des profs. J’aime transmettre.
Mais je ne suis pas naïve.
Le yoga, pour beaucoup – moi y compris avec « Ma Boîte à Outils Yogi », est devenu un secteur d’activité à part entière, avec ses stratégies marketing, des offres récurrentes, des lancements millimétrés.
Ce n’est pas mal en soi.
Mais il est essentiel de rester lucide : nous ne jouons pas toutes selon les mêmes règles.
Certain.es sont là pour vendre. D’autres pour transmettre. D’autres pour faire les deux.
Mais quand on publie un article qui devient un support commercial pour un projet qui n’est pas le sien, il est normal de poser des limites.
Ce que j’ai fait
J’ai écrit deux emails. Cordiaux, respectueux, directs.
Je n’ai pas hurlé au vol. Je n’ai pas tagué tout Instagram.
J’ai simplement exprimé ma surprise :
>> le texte avait été modifié
>> mes liens supprimés
>> l’usage de mon nom semblait cautionner un message qui n’était pas le mien
J’ai proposé une solution simple : reprendre le texte d’origine et rétablir les liens.
La réponse ? Des excuses pour un “quiproquo” (…soit).
Mais surtout : une invitation à me demander « quand j’étais prête à retirer l’article ».
Pas de réparation.
Pas de remise en contexte.
Juste une porte de sortie.
Pas un drame. Mais un rappel.
Je n’écris pas cet article pour faire un scandale.
Mais parce qu’il est temps d’oser parler de ces zones grises qu’on croise souvent quand on enseigne, qu’on crée, qu’on écrit dans le monde du yoga.
👉 Ce n’est pas parce qu’on est dans le bien-être qu’on doit tout accepter.
👉 Ce n’est pas parce que l’autre “ne voulait pas mal faire” qu’il n’a rien à réparer.
👉 Ce n’est pas parce que c’est “du contenu gratuit” qu’il n’a pas de valeur.
À toi, si tu crées aussi
Tu écris des textes pour tes élèves ?
Tu proposes des méditations en ligne ?
Tu imagines des flows originaux, des visuels, des podcasts ?
Tu es autrice, créatrice, pédagogue.
Et ce que tu fais mérite d’être respecté.
Ce n’est pas “égoïste” de le rappeler.
Ce n’est pas “oublier la sororité” que de poser un cadre.
C’est au contraire une manière de protéger ton énergie créative, pour continuer à donner sans t’épuiser.
Ce que cette expérience m’a appris
Je ne regrette pas d’avoir écrit cet article, même s’il a été détourné.
Il m’a permis de clarifier ce que j’accepte… et ce que je ne tolère plus.
Il m’a rappelé que mon travail mérite autant de soin après publication qu’au moment de sa création.
Et il m’a aussi donné envie de continuer à former des profs qui créent en conscience, qui savent poser leurs mots, leurs prix, leurs conditions.
Parce que dans ce monde mouvant où les tendances vont vite, la seule chose qui t’appartient vraiment, c’est ta voix.
Protège-la. Nourris-la. Et fais-la entendre.
